Salut à tous,
Je m'en viens vous narrer la petite histoire de ma rencontre, aussi brève qu'intense, avec une Yamaha V-Max, version 2009-2010 (la nouvelle, quoi). Cette "grosse" et délicieuse beauté ressemble à ça:
Ce qu'il faut retenir:- C'est n'importe quoi...
- "OH PUTAIN, OH PUTAIN, OH PUTAIN, OH PUTAIN!" (quand on accélère)
- C'est totalement n'importe quoi...
- Un moteur DEMONIAQUE qui n'a aucun égal sur la planète Terre
- C'est absolument n'importe quoi...
- Autonomie scandaleusement élevée: entre 80 et 100 kilomètres maxi avant poussette
- C'est franchement n'importe quoi...
- Une qualité de finition exemplaire, sans faute et somptueuse dont certains "grands constructeurs historiques américains, vendant des bicylindres hors de prix" devraient s'inspirer
- C'est radicalement n'importe quoi, mais J'ADORE...
- Une maniabilité sidérante, un freinage puissant et un grand confort d'utilisation
On la regardeMoto prêtée par un collègue pour un essai à durée indéterminée dans les plaines de l'Ain et les petites routes de l'Isère.
Vu comme ça, c'est un joli monstre mécanique mais pas dénué d'élégance. "L'esprit" des premières V-Max est bien préservé. Les gouts et les couleurs mais moi, j'aime bien les grosses. Et la V-Max est TRES grosse. Miam. Venant d'une Fat Bob de chez Harley, je me sens presque à la maison, eut égard au gabarit de la V-Max; V-Max qui sait bien tromper son monde puisque les écopes de réservoir sont là plus pour la déconne qu'autre chose, et le réservoir est... un faux réservoir (mais j'y reviendrai!!!).
Forcément, on ne peut s’empêcher de penser à une Diavel, cette dernière étant sortie bien après. Mais force est de reconnaitre que la V-Max a l'air nettement plus civilisée et organisée (esthétiquement parlant, hein?) que la Diavel, moto coupée en deux avec un avant infernal et un arrière médiocre façon planche à pain suspendue dans le vide. Je sais, il ne faut pas raisonner par comparaison de façon systématique mais on s'en branle.
On monte dessus et on la démarreTout de suite, premier ressenti: confort ultime du fessier. La selle est accueillante et le petit dosseret de lombaire fait son office (on comprendra TRES VITE pourquoi, lors des premières accélérations). Le guidon, les commandes, les cales-pieds "tombent" bien et c'est très naturellement qu'on se retrouve en position de conduite agréable, les jambes un poil repliées les bras légèrement tendus en avant. La bête a un centre de gravité que j'ai ressenti comme assez bas, ce qui aide pour les manoeuvres en poussette et en basse vitesse. On se sent chez soi, quoi!
On la démarre et là, sur le très, très, très beau et bien foutu tableau de bord, la V-Max nous dit bonjour. "Time to ride - This is V-Max" s'affiche sur l'écran LCD. Ouais, ouais, ouais... Tout un programme! Mais quel programme!
Le bruit (pots d'origine) est rauque, malgré le ralenti très poli du moteur. Tout de suite, j'ai eu l'impression d'être assis sur une Tsar Bomba taciturne... Je tente quelques tours de moteur au point mort et ça donne: Wagner + Bach + Carcass + Venom. En un mot: sauvage!!!
On roulePremière chose qui surprend: la facilité d'utilisation. La V-Max, malgré son gabarit, se manie avec aisance, même à basse vitesse. L'équilibre de la moto est sans faille (difficile de la prendre en défaut sur ce point) et le plaisir de conduire en est décuplé. Et c'est justement là le problème: elle se conduit trop facilement par rapport à la puissance (dark-démoniacale of hell) qu'elle délivre. Mais dans un sens, tant mieux. On n'a pas affaire à une vieille 1300Z.
Première accélération = la première de nombreuses érections. Le moteur est un concentré de vivacité, de sauvagerie, de fureur, de brutalité, de monstruosité et... de souplesse. Je me suis rarement fait aussi peur sur une bécane. Accéls en sortie de virage, et je me retrouve catapulté sur la route, les lombaires venant taper sur le fameux dosseret (heureusement qu'il est là, sinon la V-Max aurait continué toute seule et moi, je serais encore dans le fossé). En ligne droite, on se tient au guidon comme on se raccrocherait à une bouée de sauvetage; mais toujours avec un sourire béat aux lèvres, et un filet de bave qui dégoute.
La force du moteur est, je n'aurai de cesse de le répéter, admirable. La transmission finale, sans brusquerie, procure une souplesse et une douceur dans les bas régimes, et une explosion de chevaux dès qu'on essore au delà de 5000/6000 trs/min.
Aussi étrange que cela puisse paraitre, on peut enchainer les virolos avec facilité. La V-Max se met bien sur l'angle et y reste, et ce malgré l'imposant gommard arrière (dont la durée de vie est plutôt courte et dont le prix est indécent). En conséquence de quoi, il faut bien connaitre la route sur laquelle on se retrouve, car la V-Max n'aime pas, à mon sens, l'improvisation.
La V-Max donne envie de rouler, et de rouler très (trop?) fort; ce qui, nous le verrons plus tard, est fatal pour le porte-monnaie. En effet, elle consomme et suce comme une prostitué ukrainienne assoiffée, ce qui fait que j'ai du passer à la pompe une première fois après avoir fait 85 bornes, et la seconde fois après 110 bornes environ. Au vu du prix de l'engin, ça fait mal au ionf... Le réservoir est situé sous la selle et il est minuscule. Qui est donc l'ingénieur brillant qui a dit que sur une telle meule, il fallait avoir un réservoir aussi microscopique? Très grosse faute de gout, Monsieur Yamaha. Et que l'on ne vienne pas me dire que c'est "l'esprit V-Max": on est en 2012 et avoir une meule qui fait 85 bornes avant réserve, c'est n'imp'.
De par la débauche de puissance, on pourrait croire que le châssis et le cardan vont partir en couilles: il n'en est rien! Jamais la V-Max ne se désunit. Et vu la fureur de la bête, on s'en félicitera plus d'une fois!
Pour info, je suis allé la tester sur les routes près des Grottes de la Balme et j'ai fait tirer jusqu'au château de Brotel, Hyères sur Amby, Serrières de Briord et Montagneux.
Le freinage est surpuissant, avec un feeling très doux au levier. Mais heureusement que ça freine, cet engin! Il faut impérativement régler les suspensions arrières au plus fort, de façon à ce que la moto ne se tasse pas sur elle-même lors des freinages.
Le comportement dynamique et le transfert de masse sont irréprochables; mention très bien sur ce point. Dans les petites routes (presque) de montagne, elle s'en sort très bien et aussi étonnant que ça puisse paraitre, les épingles s'enchainent à la perfection, grâce à la disponibilité indéfectible du moteur (un gros 4 cylindres bien couillu).
Les vitesses passent avec beaucoup de douceur, l'embrayage est très sensible (gros bourrins: faites attention) et tout ça me permet de dire que la V-Max doit être menée avec beaucoup d'humilité. Elle pardonne très peu d'erreurs, voire aucune erreur en fait... Sur une V-Max, j'ai du reconsidérer mes options de conduite et j'ai tout de suite compris que c'est moi qui devait me faire à la moto, à ses spécificités, à son caractère. Et c'est bien là tout son charme: cacher des traits de caractère derrière une apparente brutalité, alors qu'en la pratiquant sur le long terme, elle doit sans aucun doute révéler nettement plus de qualités!
On la rend à son propriétaireOn se demande dans quel domaine autre que la sauvagerie elle peut exceller. Le plus gros soucis reste son autonomie réduite, qui est encore plus réduite quand on essore la poignée... Elle se manie bien, il y a pas mal d'accessoires (hors de prix) vendus par Yam', on peut envisager d'aller sur l'autoroute avec tellement elle est confortable, on peut envisager de la balade/de l'arsouille car elle peut le faire mais, encore et toujours, les caprices du réservoir minuscule viennent réfréner nos ardeurs...
Mais en la mettant sur la béquille (attention: cette dernière est minuscule et à tendance à partir vivre sa vie...), en la regardant une dernière fois, j'étais sous le charme et j'aurais volontiers craqué pour elle.
C'est une moto déraisonnable, insensée, brutale, démoniaque, infernale, surpuissante, onéreuse MAIS... attachante, débordante de personnalité, fiable, ultra bien finie (mention très bien sur ce point, certains constructeurs devraient en prendre de la graine...), capable de distiller des sensations inédites pour une moto, singulière et, aussi étonnant que ça puisse paraitre, qui donne envie de rouler tous les jours.
C'est donc difficile de dire à quel usage on peut la consacrer... Elle sait presque tout faire, mais la toute puissance du moteur vient nous rappeler à l'ordre constamment.
Un très, très gros coup de coeur pour une très, très grosse moto, donc. Je ne cache pas que j'aurais adoré repartir avec (malgré le gouffre à pognon qu'elle représente). A part la Kawasaki 1300Z (six cylindres furieux), j'ai rarement eu un tel effroi à l'accélération avec une moto.
J'en recommande donc fortement l'essai, mais avec beaucoup de prudence et de douceur pour apprivoiser la bête. En cela, la V-Max est un coup de maitre car elle oblige son conducteur à rester calme, à ne pas perdre son sang froid, alors qu'elle invite à chaque tour de roue à rouler de façon déraisonnable!
Apprendre à résister à la tentation, c'est aussi simple que de conduire une V-Max!
